Institutionnaliser le tirage au sort à Bruxelles -
Qu’en pensent nos politiques ?
Rapport public Agora - Décembre 2018
Nous le savions déjà : la météo est souvent sombre pour les Bruxellois. Selon une enquête de 2017, alors que 47% des citoyens sont favorables (27% neutres et 25% contre) à la mise en place d’une assemblée législative mixte composée d’élu.e.s et de citoyen.n.es tiré.e.s au sort au niveau fédéral, seuls 29% des politiciens belges se déclarent en faveur (6% neutres et 67% contre) de ce type d’assemblée. Un magnifique cas d’école de l’écart entre la politique et les citoyens. Mais, qu’en est-il des résultats en fin 2018, à l’heure où les élections de mai 2019 approchent à grand pas ?
Pour le savoir, Agora a rencontré les partis politiques représentés au Parlement bruxellois, en privilégiant le président de chaque parti régional. De juillet à septembre, nous avons mené une grande enquête auprès des partis politiques bruxellois : Ecolo, le PS, le cdH, DéFI et le PTB-PVDA ont répondu à nos questions. Au nombre de six, elles concernent leur opinion sur l'institutionnalisation du tirage au sort et sur l’éventuelle présence d’une assemblée citoyenne élue par tirage au sort au Parlement bruxellois dès mai 2019. Les résultats sont édifiants : ils révèlent la grande disparité des partis sur ce point. La Figure 1 résume de manière synthétique l’enquête. Il est commenté ci-après.
(cliquez sur l'icone PDF pour accéder à la version pdf du tableau)
Soyons optimistes, deux partis déclarent explicitement qu’ils soutiennent la mise en place d’une assemblée tirée au sort: le PS et le parti Ecolo. Des initiatives ont déjà été entreprises par Ecolo pour rendre possible les commissions mixtes ; le PS, bien que conscient de l’urgence de cette question, n’a apparemment pas encore décidé comment mettre cette option en pratique. Un gros bémol cependant : pour le PS, cette assemblée devrait être uniquement consultative. Selon Ecolo, les citoyens tirés au sort pourraient délibérer avec les élus dans les commissions parlementaires mais ils n’auraient pas le même pouvoir décisionnel qu’un parlementaire. On tombe donc de nouveau dans le schéma frustrant d’une participation citoyenne sans suffisamment de conséquences politiques. La participation est présente, mais en gardant tout le contrôle, et donc le pouvoir.
Du côté des autres partis, le ciel de la démocratie peine à s’éclaircir. Le cdH et DéFI ne se prononcent pas vraiment sur la question. Bien qu’ils n’y voient pas d’opposition de principe, le sujet n’y est pas ou peu abordé. Il s’agit d’un choix de priorités : malgré les mobilisations citoyennes et l’envie des citoyens de participer au débat, ces questions n’ont pas encore été débattues au sein de ces partis. Au cdH, les avis divergent. DéFI n’envisage pas pour l’instant d’en faire cas. Enfin, le temps se gâte avec le PTB qui soutient le système représentatif et électif actuel. Il ne pense pas que le tirage au sort soit une solution.
Pourquoi l’avis de la population n’est-il pas entendu ? Cinq partis sur les six interrogés déclarent ouvertement que le tirage au sort ne fait pas partie de leur programme pour les élections régionales. Et aucun des partis politiques consultés ne pense que ce type d'assemblée devrait avoir un rôle décisionnel, ne serait-ce que sur une partie des dossiers. Lorsqu’ils soutiennent l’existence d’une telle assemblée, les partis la voient comme un dispositif non contraignant et sans pouvoir démocratique direct. Autrement dit, comme on pouvait s’y attendre, les partis politiques ne souhaitent pas que la population soit amenée à participer aux décisions de manière directe.
Sur base d’une analyse détaillée de la situation et des multiples alternatives passées ou présentes à ce sujet, Agora, mouvement citoyen, a développé une position qu’elle souhaite défendre aux élections régionales de mai 2019 pour la Région de Bruxelles-Capitale. Nous nous mobilisons pour la mise en place d’une assemblée régionale composée de citoyen.ne.s tiré.e.s au sort, qui serait représentée par des élu.e.s au Parlement bruxellois. Nous sommes convaincus de la nécessité d'un mouvement comme le nôtre pour transformer le système démocratique en profondeur. La liste que nous présentons aux élections pourrait permettre à au moins un.e porte-parole élu.e au Parlement bruxellois de relayer les décisions de l’assemblée tirée au sort. Cette assemblée, que nous mettrons en place en septembre 2019, se veut ouverte à tous/toutes et détachée de l’électoralisme régulier, représentative de la diversité de la population bruxelloise, dans le but de débattre et de formuler de réelles propositions à soumettre au Parlement bruxellois. Ce porte-parole aura pour seul programme d’institutionnaliser le tirage au sort pour compléter le système, et de porter les décisions prises par l’assemblée au Parlement. Dès mai 2019, la mise en place d’un système pour réellement représenter les citoyens et répondre à leurs demandes et à leurs besoins.
Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre texte fondateur, notre foire aux questions, ou à vous joindre à l’initiative Agora.